Écriture inclusive

Quelles solutions ?

30/07/2021

Avant toute chose

On parle beaucoup de l’écriture inclusive depuis quelques années. Personnellement, je n’y mets pas l’écriture avec point médian qui est une aberration de mon point de vue et je m’en explique plus loin. Toutefois, il existe plusieurs solutions comme indiqué sur L'écriture inclusive sans points médians, c'est facile : 6 autres solutions ⎋(1)

L’objet du débat n’est pas de remettre en cause l’objectif sous-jacent à l’écriture inclusive, à savoir un traitement identique (donc égalitaire et non, hélas, équitable) entre les femmes et les hommes. C’est lui qui est important et qui devrait rester au centre du débat.

Écriture ou expression inclusive ?

En tout premier point, on parle d’écriture inclusive, mais on devrait parler d’expression inclusive. Peut-on seulement écrire de manière inclusive et ne pas s’exprimer oralement de la même manière ? Ce n’est pas possible.

Remplacer « croyants » par « fidèles » n’est pas équivalent dans notre manière de penser à changer un mot argotique que l'on se permet à l'oral par le mot correct à l'écrit. Écrire de manière inclusive doit se faire naturellement car nous devons penser et parler de manière inclusive. C’est un changement de mentalité.

Nous sommes toutefois formatés par des années d'apprentissage ; de même, la manière de penser et le langage sont très liés : il est très perturbant quand on apprend le finnois de ne pas avoir de futur ou de verbe avoir, car notre réflexion de Français nous met en difficulté par rapport à celle des Finlandais.

Si l'écriture inclusive est à prendre en considération, c'est bien pour remettre sur un pied d'égalité la femme et l'homme ou plus globalement (et c'est mieux de le voir ainsi) tous les êtres humains qu'ils se sentent appartenir à un genre ou pas.

De plus en plus de jeunes ne veulent plus être associés à un genre quelconque soit parce qu’ils se sentent tour à tour homme puis femme et d’autres, car ils se sentent à la fois homme et femme. Si l’on commence une évolution importante de la langue française, il ne faudrait pas se retrouver dans quelques années à devoir encore la faire évoluer parce que l’on n’aura pas anticipé un mouvement qui est déjà lancé.

Et si on parle d’expression inclusive, le point médian disparait de lui-même ; on ne peut pas l’exprimer à l’oral ; c’est d’ailleurs une des difficultés que rencontrent les lecteurs d’écrans pour les personnes ayant une déficience visuelle, même si des progrès ont été réalisés ; c’est pour cela que c’est une aberration à mes yeux.

Que faire alors ?

Si l’on s’en réfère au lien que j’évoque plus tôt, concernant l’expression inclusive, les solutions possibles sont les suivantes.

Mot épicène

C’est un mot qui ne porte pas de genre et qui s’écrit sous la même forme indifféremment du genre qui lui est associé. Par exemple : un fidèle, une fidèle, des fidèles.

Les mots épicènes semblent être une très bonne solution, mais ils induisent deux biais :

Formule englobante

Elle fait mention soit d’un collectif (exemple : le monde agricole) soit d’une fonction.

Il me semble que ce soit la meilleure solution, car elle ne change pas la langue française et apporte une solution pour les êtres non genrés. Elle présente toutefois deux biais dans certaine situations :

Féminisation des noms

C'est aussi une bonne solution mais cela devrait se faire sans complexifier la langue française et en utilisant les règles déjà existantes :

  Il ne faut pas non plus se tromper entre les métiers et les fonctions ; un homme peut être la tête de liste d'un parti.

  Les personnes non genrées ne sont pas représentées par cette féminisation.


Double flexion

Elle consiste à doubler le terme pour avoir le féminin et le masculin comme dans "Citoyennes, Citoyens !".

On pourrait penser que c'est une bonne solution mais avec deux biais :

Alternance

Elle consiste dans des listes à alterner le féminin et le masculin : « médecins, chirurgiennes, infirmiers, brancardières »

Déjà on voit que médecin au féminin n'est pas aisé et il faut positionner le mot au bon endroit dans la phrase.

Quand on écrit cela, il faut penser à l'alternance ; facile quand les mots sont à la suite mais plus difficile si on ajoute des descriptions surtout à l’oral.

De plus, ce type de formulations peut aboutir à encore plus de difficultés : en effet, si je suis orateur et que j'ai des personnels de santé face à moi et que je m'adresse à l'auditoire avec les 4 mots précédents, comment dois-je dire s'il n'y a que des infirmières ... Je dois donc revoir l’ordre des mots.

L’alternance me semble demander l’acquisition de réflexes beaucoup trop complexes pour être viable.


Reformulation

La reformulation est la réécriture ou réexpression du texte pour supprimer tout notion de genre.

Autant la reformulation suivante me semble très adaptée :

Autant la suivante ne va pas dans le bon sens :

Il est donc nécessaire de bien faire attention à la reformulation pour qu’elle ne change pas la portée du message.

Conclusion

En conclusion, selon mon point de vue, seules la reformulation ou la formule englobante lorsqu’elle est adaptée sont faciles d’emploi et sans conséquence ; les mots épicènes viennent ensuite suivis par la double flexion et la féminisation bien appliquée, mais en ayant en tête les biais qui leur sont associés. L’alternance et encore moins le point médian me semblent être des solutions à employer.

Par la suite, il faut aussi se poser la question suivante. Quel est le réel impact du langage et donc d’une expression inclusive sur le résultat recherché, à savoir un changement de mentalité et un traitement égalitaire voire équitable entre les femmes et les hommes ? Est-ce que les autres pays qui ont une langue déjà inclusive ou quasiment voient la condition des femmes améliorée par rapport à celle des hommes ?

Par exemple en Angleterre où la langue est quasiment inclusive, l’écart de salaire entre les femmes et les hommes est presque identique à celui existant en France. La question reste, pour moi, complètement ouverte et je n’ai pas de réponse.
 La crainte que j’ai par rapport au sujet est que l’expression inclusive ne soit qu’un arbre qui cache le feu qu’il y a dans la forêt et que certains puissent la mettre en avant pour ne pas aller plus loin.

Il faut donc traiter le sujet à la racine avant toute chose et utiliser l'expression inclusive autant que faire se peut, sans obligation.

Notes et renvois

(1) : lien envoyant dans un autre onglet sur le site de Relire et Corriger ┃ retour au texte, note (1) ䷀